Les nouveaux critères pour apprécier le secteur géographique conditionnant la possibilité de modifier le lieu de travail

Cass. soc. 24-1-2024 n° 22-19.752 F-D, Sté ID Logistics France c/ I

ACTUALITÉ

3/21/20242 min lire

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La Cour de cassation considère que les coûts supplémentaires engendrés par l'utilisation d'un véhicule personnel peuvent être pris en compte pour évaluer la portée géographique et déterminer si un changement de lieu de travail constitue une modification du contrat de travail.

Un changement de lieu de travail n'entraîne pas automatiquement une modification du contrat de travail. En l'absence de clauses contractuelles définissant le lieu de travail ou de clauses de mobilité, et à moins que la nature du poste n'implique une mobilité géographique spécifique, c'est le changement de secteur géographique qui caractérise une modification contractuelle. Bien que la Cour de cassation ait introduit le concept de "secteur géographique", elle n'en a pas donné de définition précise, exigeant simplement une évaluation basée sur des critères objectifs. C'est donc aux tribunaux de déterminer, à partir d'un ensemble d'indices, si un changement de secteur géographique a eu lieu, la Cour de cassation exerçant un contrôle sur cette question.

Les critères généralement retenus par la jurisprudence incluent :

  • la similarité des bassins d'emploi ;

  • la distance entre les lieux de travail et leur accessibilité par les transports en commun ;

  • l'infrastructure routière et les conditions de circulation


Les tribunaux combinent souvent ces critères pour déterminer si un changement de poste constitue simplement une modification des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur, ou une modification contractuelle nécessitant le consentement préalable du salarié.

Dans un arrêt du 24 janvier 2024, la chambre sociale de la Cour de cassation se prononce sur de nouveaux éléments. Dans cette affaire, une employée avait refusé d'intégrer un nouveau site de travail situé à quelques kilomètres de son ancien lieu d'affectation, ce qui avait entraîné son licenciement pour faute grave. La cour d'appel avait jugé ce licenciement abusif, considérant que les deux sites n'appartenaient pas au même secteur géographique, en se basant notamment sur les moyens de transport disponibles.

L'employeur, en appel, soutenait que la distance entre les deux sites était de seulement 35 km, et que ceux-ci appartenaient au même département et étaient rattachés à la même chambre de commerce et d'industrie. Il argumentait ainsi que le changement d'affectation relevait simplement d'un ajustement des conditions de travail. Ces arguments ont été rejetés par la Cour de cassation.

La Cour a confirmé la décision des juges du fond, considérant que les deux localités ne faisaient pas partie du même secteur géographique. Elle a souligné que les deux sites n'étaient pas dans le même bassin d'emploi, et que le covoiturage était difficile en raison des horaires de travail. De plus, l'employeur n'a pas fourni de preuves montrant que les transports en commun étaient facilement accessibles entre les deux communes pendant les heures de travail de l'employée.

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Mathieu MICHELON

Avocat au barreau de Nice