Le refus du salarié d'un changement d'horaire portant une atteinte excessive à sa vie personnelle ne peut constituer une faute

Cass. soc. 29-5-2024 n° 22-21.814 F-B, Sté Action sécurité Europe privée c/ K.

ACTUALITÉ

Mathieu Michelon

5/30/20242 min lire

grayscale photo of wall clock displaying 4:04
grayscale photo of wall clock displaying 4:04

Un salarié, père d'une enfant handicapée, peut légitimement refuser de passer d'un horaire de nuit à un horaire de jour si ce changement affecte excessivement sa vie personnelle et familiale. La Cour de cassation réaffirme que les modifications de contrat ou de conditions de travail qui nuisent à la vie personnelle et familiale peuvent être refusées par le salarié. En particulier, la prise en charge d'un enfant lourdement handicapé est une obligation familiale impérative rendant un tel changement d'horaire incompatible.

Dans cette affaire, un employeur ayant repris un marché de sécurité a notifié à un agent de sécurité incendie son passage d'un horaire de nuit à un horaire de jour. Le salarié a refusé, expliquant que sa présence à domicile durant la journée était nécessaire pour s'occuper de sa fille de 7 ans lourdement handicapée. L'employeur, ignorant cette justification, a licencié le salarié pour faute grave, arguant que le refus de ce changement constituait une faute disciplinaire selon le contrat de travail, qui stipulait la possibilité de travailler de jour comme de nuit.

La Cour de cassation a jugé ce licenciement injustifié, soulignant que le passage d'un horaire de nuit à un horaire de jour constitue une modification significative du contrat de travail nécessitant l'accord du salarié, même si le contrat ou la convention collective prévoit cette possibilité. Le refus de ce changement ne peut donc pas justifier un licenciement pour faute grave.

Deux éléments clés ont conduit à cette décision. Premièrement, le salarié a fourni la preuve de ses contraintes familiales, notamment une décision de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) attestant la prise en charge par les parents d'au moins 20 % des activités de l'enfant, réalisées durant la journée. Deuxièmement, l'employeur a fait preuve de mauvaise foi en ne tenant pas compte de la situation particulière du salarié et en ne cherchant pas de solution alternative pour maintenir le salarié à son poste de nuit ou lui proposer un autre poste en horaires nocturnes.

En conclusion, la Cour de cassation confirme que si les horaires de travail proposés portent une atteinte excessive au droit au respect de la vie personnelle et familiale, ils représentent une modification du contrat nécessitant l'accord préalable du salarié. Dans ce cas, l'employeur aurait dû renoncer à cette modification ou licencier le salarié pour une cause non disciplinaire liée à la modification du contrat de travail.

Besoin de conseils à ce sujet ? N'hésitez pas à prendre contact avec le cabinet via le formulaire de notre site.

Mathieu MICHELON

Avocat au barreau de Nice